Lors d'une adaptation personnelle de la théorie des transitions socio-techniques, Rachel Jouan Daniel de Climate Adaptation Consulting nous explique comment la crise du Covid peut être une fenêtre ouverte pour changer de modèle. Schéma à l'appui, elle nous explique comment dans notre modèle de la mondialisation libérale, l'idée de la " croissance infinie" est favorisée mais les inégalités sociales et les problèmes environnementaux ( les externalités négatives) sont négligées. Ce système repose sur la confiance de tous et la croyance qu'il n'est pas possible de" faire autrement". Ce modèle est très stable, verrouillé. En marge de ce modèle, il y a des "niches" qui expérimentent de nouvelles pratiques, diffusent de nouvelles idées et alertent. Elles sont constituées de pionniers, dont le rôle est d'alerter sur les limites du modèle dominant et sur les externalités négatives. Les idées, les techniques et les pratiques des niches font d'abord l'objet de moqueries, puis d'une forte opposition. La question est de savoir comment on passe d'un modèle dominant à un nouveau modèle. Les chercheurs sur la théorie des transitions socio-techniques nous disent qu'il faut, pour cela, un choc majeur par le haut : conflits, révolutions, pandémies, catastrophes majeures. Et il faut, en même temps, une pression sociétale par le bas, dont, en particulier, la perte de confiance de la population, de la société vis à vis du modèle dominant et une maturité des niches qui ont fait la preuve qu'il était possible de faire autrement. Avec la crise du COVID, on a simultanément les deux chocs : une pandémie mondiale, une perte de confiance vis à vis de la mondialisation "heureuse" et on s'aperçoit que ce qui était impossible jusqu'à présent devient possible et ce, très rapidement. Tous les voyants sont donc au vert aujourd'hui pour changer de modèle, et c'est une chance. Mais il y aura des obstacles. Le premier est d'ordre conjoncturel : on est dans la gestion de crise et force est de constater que la tendance lourde est un retour "à la normale". Le second obstacle est sur le récit nouveau que nous voulons, avec qui on le porte et surtout à quelle échelle on le porte est ce que c'est le local, le régional ou des échelles supérieures. "Quoiqu'il en soit, s'il on veut agir dans cette fenêtre de tir, la question que je me pose c'est : où est ma capacité d'action et à quelle échelle mon action est elle la plus efficace et la plus motivante ?"conclut elle. Rachel Jouan Daniel, Climate Adaptation Consulting - 7 Mai 2020